Comment ai-je pu m'associer à l'hommage rendu à un homme qui m'avait tellement traumatisé lorsque j'étais élève de ce qui s'appelait alors « le Collège d'Armentières » ?
M.Quenu y était surveillant. Une terreur . Dans une salle de permanence de 60 élèves, aucun n'osait parler et même chuchoter de peur de se voir infliger 12 alexandrins de Victor Hugo extraits de « La légende des siècles » ou de quelque autre poème aux références bibliques ésotériques.
La rumeur, devenue légende prétend même que M. Quenu surveillait les élèves par un trou dans le journal qu'il tenait devant lui . Comment peut-on rendre hommage , 30 ans après sa mort, à un homme aussi cruel ? Comment puis-je effacer la terreur qu'il m'inspirait alors que j'avais une dizaine d'années ?
Mon regard a changé quand j'ai appris que M. Quenu et son épouse avaient été reconnus, à titre posthume, comme « Justes Parmi Les Nations » , un des titres de reconnaissance les plus respectables.
Ils avaient en effet, entre 1942 et 1945, au péril de leur vie, recueilli, nourri et entouré d'affection 2 petits enfants juifs de 3 ans,traqués par les nazis.
Ils avaient en effet, entre 1942 et 1945, au péril de leur vie, recueilli, nourri et entouré d'affection 2 petits enfants juifs de 3 ans,traqués par les nazis.
Me Ernould qui fut leur amie dit d'eux « qu'ils ont toujours eu le souci de faire le bien autour d'eux.Ils étaient catholiques pratiquants et ne manquaient pas d'appliquer leur amour du prochain à chaque instant du quotidien. Les enfants avaient de faux papiers appartenant à des enfants décédés lors des bombardements de Dunkerque. Beaucoup d'amis n'étaient pas dupes et savaient pertinemment que ces enfants n'étaient pas leur neveu et nièce... »
J'ai donc vu M. Quenu sous un autre jour et je me suis joint samedi à l'hommage que l'on rendait à l' homme que j'avais tellement craint .
Le temps estompe certes les tourments du passé. Il n'empêche qu'une question subsiste dans mon esprit : comment un même homme peut-il se montrer aussi sévère et aussi généreux ?
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